Justice

Un changement de mentalité

La Justice n’a pas vraiment besoin de réforme, mais un changement de mentalité pour s’adapter à la morale du troisième millénaire. Elle a entre ses mains tous les outils pour répondre à l’erreur médicale. Dans le cas de l’homicide involontaire, considéré en d’autres lieux comme un crime, la Justice dispose d’un Code pénal dont l’article 419 prévoit que ‘quiconque aura involontairement causé la mort d’une personne sera puni d’un emprisonnement de trois mois à deux ans et d’une amende de cinquante francs à mille francs’.

En Belgique, s’agissant de médecins, la Justice a pour habitude d’accorder la suspension du prononcé et de préférence sans publicité. Une ordonnance en date du 18 août 2006 de la Chambre du Conseil du tribunal de première instance de Bruxelles motivait la suspension du prononcé accordée au Dr Bernard DUPONT, généraliste de Kraainem par ces termes :

‘ Que certes, le défaut de prévoyance ou de précaution dont l’inculpé se serait rendu coupable a eu des conséquences tragiques et irréparables,

Qu’il paraît évident qu’une publicité de cette affaire risque d’avoir pour conséquence de détourner les patients de l’inculpé vers d’autres médecins,

Qu’il y a dès lors lieu de faire droit à la demande de l’inculpé et d’accorder la mesure de suspension du prononcé de la condamnation,’

Ce faisant, la Justice couvre l’attitude catastrophique d’un médecin au détriment de l’intérêt général. En effet, rien ne permet d’exclure une récidive. Dès lors, il convenait de rendre public cet homicide involontaire pour permettre aux clients de ce généraliste de se forger leur propre conviction quant à lui faire confiance ou non.

Absence de publicité

La décision de Justice mentionnée précédemment précise qu’elle a été prononcée en audience publique. C’est vrai ! Mais il faut en connaître les circonstances. Les salles d’audiences de la Chambre du Conseil au Palais de Justice de Bruxelles se trouvent loin du passage du public au fin fond d’un couloir au sous-sol du bâtiment. Les débats lors des audiences se tiennent à huis clos. Pour le temps de la lecture de l’ordonnance, l’huissier ouvre la porte (et la referme immédiatement après). Ceci permet de noter dans l’ordonnance qu’elle a été rendue en audience publique !

Absence de sanction pénale

Rappelons que seul 5% des médecins coupables d’homicide involontaire font l’objet d’une sanction pénale. Ce chiffre est repris d’un rapport d’audition de la Chambre des Représentants de Belgique, daté d’avril 2004, sur les aléas thérapeutiques et la responsabilité médicale.
Un tel signal de la Justice ne peut que suggérer l’impunité du médecin face à l’exercice de son métier. Dès lors, le chiffre de 20.000 cas d’erreurs médicales dont 2.000 morts par an en Belgique trouve une part d’explication.

Les engagements de la Belgique

La Belgique est signataire de la Convention européenne des droits de l’Homme. L’article 6 de la convention précise que tout un chacun a droit à un procès juste, équitable et public, ‘mené à armes égales’.

La Belgique est également membre de l’Union européenne qui par décision-cadre du 15 mars 2001 stipule que chaque Etat assure aux victimes un rôle réel et approprié dans son système judiciaire pénal. Qu’il continue à œuvrer pour garantir aux victimes un traitement dûment respectueux de leur dignité personnelle pendant la procédure et reconnaît les droits et intérêts légitimes des victimes, notamment dans le cadre de la procédure pénale.

C’est ce que notre association compte rappeler à nos législateurs qui, hors période électorale, semblent être loin des préoccupations des victimes directes et collatérales de faits d’erreurs médicales.